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Les shappocks

Journée sans achat
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2006 - 2005 - 2004
2003 - 2002 - 2001
2000 - 1999

Rentrée sans marque
2009
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2006 - 2005 - 2004
2003 - 2002 - 2001
2000

Campagne pour
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La fin de la F1
Résumé

2007 - 2006
2004 - 2003
2002 - 2001

Marche pour la décroissance
(juin 2005)

La F1 à Lyon 2004

Semaine sans écran
2010
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Semaines sans télé
2008 - 2007 - 2006
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2002 - 2000 et 2001

Les économistes

Pas de sang
pour l'essence

Casseurs de pub

Rentrée sans marques 2000

En 1930, les troupes de jeunesse des pays totalitaires marchaient au pas, fascinées par les insignes cousus sur leurs chemises, se soumettant à l'ordre social. Soixante-dix ans plus tard, une nouvelle idéologie a pris place. Elle ne dit pas son nom, parle de liberté et de bonheur, mais conduit à la même soumission que ses prédécesseurs. Les insignes ont juste changé. Alors passe dans le camp d'en face. Le même défi t'attend que ceux qui comme toi dans l'histoire ont résisté.

 

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La traduction en américain de marque est brand, mot venant de brandon, outil employé pour marquer le bétail au fer rouge.

 

"L'industrie n'a qu'une très faible influence sur les programmes enseignés, et les enseignants ont une compréhension insuffisante de l'environnement économique, des affaires et de la notion de profit",

Table Ronde Européenne des Industriels

 

"L'exclusion commence avec l'impossibilité d'acheter un objet référent (une paire de Nike ou de Reebok, par exemple, pour un jeune), qui vous met en situation de marginalité."

Robert Rochefort, directeur du Credoc - Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie.

 

Nique Nike !

Quelle réussite plus éclatante pour le tyran que celle d'être adoré par ses victimes ? Les jeunes rejetés et exclus par l'économie des multinationales adorent leurs bourreaux dont ils portent les emblèmes sur leurs vêtements. La perversité de cette réussite aurait fait rêver plus d'un dictateur.

Les multinationales du tabac destinent toute leur communication aux jeunes. Le nombre d'individus commençant à fumer après l'adolescence est en effet marginal. Les manufactures de cigarettes ciblent donc délibérément ce passage de notre existence difficile, où nous cherchons des palliatifs pour répondre à un malaise social, pour rendre leurs futurs "clients" dépendants, et donc assujettis, à vie. De cette même manière, d'autres multinationales jouent avec cette période de notre existence où nous nous trouvons particulièrement vulnérable. Même si cela n'est pas pour vendre une drogue licite, elles manipulent les inconscients à seul fin de profitabilité. " L'industrie a de plus en plus recours à des anthropologues, des psychanalystes, des neuropsychologues, des gens d'une extrême compétence qui jouent avec maestria sur les peurs et les désirs des enfants. " Linda Coco - Center for Study of Responsive Law. Les capacités financières de ces multinationales permettent d'asséner massivement et de manière répétée leurs messages et la représentation symbolique de ces firmes : le logo. Celui-ci se confond alors totalement avec un emblème, auquel la marque attribue des "valeurs" (factices ou intéressées bien évidemment, car le seul intérêt d'une multinationale est de reverser des dividendes à ses actionnaires). "Les gens du marketing se sont aperçus que ce qui marchait le mieux avec les enfants, c'était le bombardement du logo de la marque." Michael Jacobson, directeur du Center for Science in the Public Interest. Les adolescents, en recherche de socialisation, se dirigeront naturellement vers les emblèmes de ces firmes, facteurs d'intégration au groupe.

Mais combien de jeunes se questionnent sur la face cachée de ces emblèmes brodés sur leurs casquettes, vêtements, sacs ? à la différence de nos anciens dictateurs, le tyran moderne se cache et ne laisse apparaître que sa marque. Si le despote laissait voir un visage humain, avec nécessairement ses faiblesses, la multinationale présente la face lisse et glacée du totalitarisme parfait. Elle ne se présente qu'au travers d'images longuement travaillées et réfléchies par des professionnels. La représentation déshumanisée de la firme est juste. La réalité d'une multinationale n'est qu'une somme d'actions cotées en bourse. Cette entité financière est servie par des individus prisonniers économiquement, ou y ayant des intérêts égoïstes, ou encore des personnes fanatisées et considérant la firme comme une fin en soi. Contraints ou volontaires, ces individus contribuent alors à un système favorisant la concentration des richesses, le travail d'enfants dans les pays du sud du globe, la destruction de la nature, et finalement l'endoctrinement de la jeunesse pour perpétuer ce système.

Si l'adolescence est une période particulièrement visée par les firmes, l'enfance constitue aussi un moment où l'être est particulièrement influençable. " lls (les enfants) pourraient bien être le dernier marché restant sur terre. (...) Face à la publicité, les adultes sont circonspects, flairent l'arnaque et le baratin. (...) Les enfants, eux, regardent la télé et s'exclament juste : C'est super !... " Barbara Caplan, vice-présidente de l'entreprise de marketing Yankelovitch Partners. La télévision et les films dégoulinant déjà de réclames, les firmes n'hésitent plus à enfoncer les portes des établissements scolaires. Des enfants d'une classe maternelle (!) parisienne ont ainsi reçu de la propagande des chaînes de restauration Hippopotamus et Mac Donald's, et de la firme Elf Atochem1. " Nos études montrent qu'une conscience des marques pourrait commencer à se former avant la fin de la première année. Par conséquent, lorsqu'un enfant atteint dix-huit mois, vingt mois ou vingt-quatre mois, il utilise déjà les marques comme des objets... " James Mac Neal, Texas A&M University. Aux états-Unis, les écoles primaires sont "câblées" par des entreprises privées. En échange, 1/5 du temps d'antenne est constitué de messages des firmes. En France, certains cours sensibles que ne désirent plus assurer certains enseignants, comme l'éducation sexuelle, sont dispensés par des représentants d'entreprises. Soixante mille adolescentes ont ainsi reçu des échantillons de Tampax offerts dans le cadre d'un "programme éducatif"2. En dépit de la loi qui interdit toute forme de publicité à l'école, la publicité envahit le système scolaire et universitaire au travers d'opérations de "sponsoring éducatif".

Une lueur d'espoir : la Suède va prendre le présidence de l'Union européenne en 2001. Elle compte élargir sa législation très restrictive de publicité à destination des enfants. " La plupart des enfants n'arrivent pas à faire cette distinction (entre la publicité et un programme) avant l'âge de six à huit ans, même si certains y parviennent dès trois ou quatre ans, et ce n'est que vers dix ans que tous les enfants ont acquis cette faculté. " Marita Ulvskog, ministre de la Culture suédoise. De nombreux pays sont favorables à cette mesure. Les propagandistes publicitaires français commencent à organiser le lobbying pour contrer cette loi3.

Mais il est temps de comprendre que ces multinationales sont livrées à la seule logique financière. Leurs intérêts sont opposés aux impératifs humanistes et écologiques. Et cette jeunesse, grandissant sous influence, doit s'affranchir de l'idéologie publicitaire, pour démanteler et maîtriser ces firmes et leurs marques.

Raoul Anvélaut

 

1 - Courriers à Charlie Hebdo - juillet 2000

2 - "Les crimes publicitaires dans la guerre moderne" d'Yves Frémion, Silence - Septembre 1999

3 - Le Monde 28.01.2000 - Florence Amalou


La pub ou l'anti-culture

"Le problème principal, ce sont les systèmes culturels de ce monde, qui sont tellement différents"

Anton Schneider, directeur de Boston Consulting

 

La pub n'est pas une nouvelle culture, c'est l'anti-culture par excellence. La culture, plus on la fréquente tôt, plus on devient un adulte autonome. La pub, plus on y est soumis tôt, plus on en devient un adepte "accroc". C'est pourquoi, la pub est doublement régressive car elle ne peut être efficace qu'en visant les fantasmes, les pulsions de tout un chacun et parce que pour infantiliser les adultes autant commencer par les enfants. Les marques tentent ainsi de fidéliser les enfants avant l'âge de deux ans. Ce dressage des plus petits n'a rien en soi de naturel ou de légitime : il y a encore vingt ans, il était interdit, en France, d'utiliser directement des gosses pour vendre des produits et il est toujours interdit, en Grèce, de passer des pubs pour des jouets aux heures où ils sont devant la télé...On sait combien c'est facile d'exploiter commercialement les rêves des gosses. Un enfant ne fait pas la différence entre une pub, une fiction, la réalité. La pub n'est pas seulement un supplément d'âme dont a besoin le système. Elle lui est indispensable à la fois pour vendre tel produit mais au delà pour faire régresser les individus au niveau de leurs fantasmes basiques. La culture avait pour fonction de museler ces fantasmes, ces phobies, pour nous rappeler que nous ne sommes pas tout-puissants, qu'on a besoin des autres et qu'aucune chose ne peut remplacer et combler ce désir de l'autre. La globalisation en cours appelle l'envahissement généralisé de la pub. McDo n'existerait pas s'il ne pouvait nous bombarder de ses messages : il en a besoin pour balayer des siècles d'histoire, d'humanisation des pratiques alimentaires, de respect des figures parentales et des identités. La pub reste (pas pour longtemps ?) interdite de séjour dans les écoles. La protection des enfants passe pourtant aussi par le refus de les y soumettre. Les marques existent certes depuis longtemps mais avec un sens différent. On était autrefois fidèle à une marque parce qu'on croyait (à tort ou à raison) que ses produits étaient meilleurs, plus résistants, plus efficaces. La réclame visait à nous convaincre par des arguments pseudo-rationnels. L'attachement actuel aux marques se nourrit en revanche d'irrationnel parce qu'il vise, avant tout, à réaliser une identification primaire. L'enfant qui exige des produits de telle marque ne justifie plus son choix par leur qualité (réelle ou fausse), mais par le seul attrait de leur nom (signe). On veut lui faire croire qu'il va obtenir, à travers lui, une identité propre. Les cultures spécifiques déclinent pour céder la place à cet ersatz culturel. Les jeunes des banlieux ne sont pas, à cet égard, insuffisamment intégrés mais beaucoup trop intégrés au système des marques, à la consommation. Cette recherche d'identification par le marché est génératrice de violence car il s'agit non seulement d'une mise en échec (comment se payer ses produits de marque) mais aussi d'un véritable marché de dupe : on ne peut jamais obtenir un équilibre social ou psychique en s'identifiant à la pub : on veut être un fil de pub comme les autres en exhibant sa conformité. L'enjeu est important : comment se définit-on ? Quelle est son identité ? Nos grands parents portaient souvent des insignes religieux, nous, nous portions plus des insignes politiques, nos enfants portent des marques : on a des enfants Nike, des enfants Benetton, des enfants McDo ou Coca ! Essayez de faire enlever une casquette dans certains lycées : impossible car c'est vécu comme une violence, le viol de l'identité même du jeune. La pub est parvenue à s'emparer des identités, à les manipuler et trafiquer. Ce n'est pas par hasard que le racket ne concerne que les marques, c'est bien une preuve de plus que le marché secrète en lui-même la violence. La pub doit pour rabaisser les personnes au rang de consommateurs inverser le profane et ce qui était considéré jusqu'alors comme sacré : elle profane les sentiments, les identités, les valeurs, les engagements. Elle nous vend de l'amour, de la tendresse, de l'amitié, de la générosité. Elle sacralise parallèlement le plus profane : "on se lève tous pour Danette" ! Mais devant quoi se lève-t-on si ce n'est devant un (nouveau ) Dieu ? La pub enlève toute dignité à l'humain pour la transférer à la marchandise. C'est elle qui fera de vous quelqu'un, sinon vous appartenez à la masse. Comment la pub représente-t-elle les consommateurs, bref les humains ? Tel constructeur automobile vous imagine en troupeau de mouton, tel autre nous voit parqués uniformément comme des places de parking. La vie sans marque serait celle de la grisaille, vaudrait-elle d'être vécue ? L'humain est identifié à un mouton, à une chose banalisée, inexpressive. Merci à Renault de nous faire sortir du troupeau, Merci à McDo d'exister. C'est le produit qui créé la surprise, qui singularise et non plus l'humain. C'est le produit qui rend libre, qui rend irrésistible, qui rend tout-puissant. La société vue par la pub est celle de la grisaille et de la monotonie. Vous ne pourriez plus rien pour vous, pour votre liberté, votre bonheur ; si ce n'est bien sûr en vous identifiant à des marques qui vous donnent un sens. La consommation de marque créerait seule un sentiment d'existence. Encore devrait-elle porter seulement sur son nom ou son logo et non sur l'utilité véritable de l'objet : une casquette Nike c'est d'abord son logo ! Cessons de croire que tout cela n'est pas grave, qu'on a un second degré. Ce n'est pas vrai que les jeunes s'approprient la pub pour la désarmer. La réclame cherchait auparavant à parler comme les gens, aujourd'hui ce sont eux qui singent le pub, qui reproduisent ses gestes, répètent ses formules. La pub, c'est une monstrueuse opération de formatage qui vise à faire régresser l'individu jusqu'au niveau de ses images les plus archaïques : on se croit, grâce au marque, tout-puissant, on devient un killer (tueur). On en libère pas ces archaïsmes sans dommage individuel et collectif. L'individu profané par le marché n'a pas d'autre solution que de s'identifier à une marque, ou plutôt à cette part d'humanité qu'elle croit vendre. "Loréal parce que je le vaux bien", Kronenbourg pour avoir des amis, etc. La pub en jouant sur le mimétisme enfantin développe une sorte de normopathie c'est à dire un besoin infantin de se soumettre à des normes. Elle tue l'imagination et la créativité chez les individus et les peuples. La pub si soft en apparence a pour cousine la propagande la plus hard. Elle est donc la fille d'un nouveau totalitarisme dans ses moyens et ses buts. La pub ne repasse pas pourtant les plats du nazisme et du stalinisme. Elle est bien plutôt ce dont a besoin la société des "deux dixièmes" c'est à dire celle, de demain, où 20% de la population mondiale suffira à faire fonctionner l'économie et où il faudra s'occuper des 80 % restant. Faut-il rappeler la proposition immonde de Zbigniew Brzezinski - ancien conseiller de Jimmy Carter et fondateur du club très fermé de la Trilatérale - de créer sous le nom de tittytainment (de tits, les seins en argot américain et de Entertainment pour divertissements) un "cocktail de divertissement abrutissant et d'alimentation suffisante permettant de maintenir de bonne humeur la population frustrée de la planète" ? On sera alors très proche de la Rome Antique (du pain et des jeux) puisqu'elle permettra le décervelage et l'endormissement de milliards d'humains. Le "je positive" de Carrefour prendrait alors toute sa véritable signification. la pub est donc bien au delà de sa fonction commerciale immédiate un enjeu véritable car elle participe à tout ce qui fait régresser l'humain. Elle est ainsi ce qui permet de rabaisser les personnes au rang de simple consommateur qui commence par consommer des produits puis consomme ensuite d'autres humains (management moderne, violences sexuelles) et finit par se consommer lui-même (dopage, sectes). La résistance contre la pub est aujourd'hui un véritable enjeu citoyen : Les lycéens américains ont montré l'exemple en menant des grèves contre les programmes de pub obligatoires tous les matins dans certains Etats. Il faut préserver l'espace public en imposant déjà le respect des règles. Il faut former les enfants à la lecture (critique naturellement) des pubs.

 

Paul Aries